bunee 0 Posté(e) le 14 novembre 2006 Partager Posté(e) le 14 novembre 2006 Roman d'Andreï Guelassimov traduit du russe par Joelle Dublanchet actes sud / babel ISBN 2-7427-5246-3 / AS1273 Splendide roman, très court mais intense. Kostia a 16 ans. Il vivait avec sa mère et son beau-père détesté dans une banlieue moscovite misérable et délabrée. Kostia allait à l'école. Il n'aimait ni l'école, ni le censeur et faisait des dessins en classe. Un jour, le censeur a vu l'un de ces dessins et les a donnés au directeur. Qui a convoqué Kostia. Un premier bouleversement se produit. Kostia devient l'élève du directeur, artiste velléitaire n'ayant jamais été jusqu'au bout de son talent, et rongé par une soif terrible et inextinguible, cette soif qui le pousse à boire d'immenses verres de vodka par grandes gorgées, par litres entiers. Mais le directeur disparaît, remplacé par le censeur. Pour le fuir et aussi fuir son beau-père, il file au bureau de recrutement de l'armée russe. Se fait enrôler. Et sa vie n'en finit plus de basculer. Lors d'une mission, alors qu'il a échangé sa place avec celle d'un ami, son VAB est touché par une grenade, précisément là où il est installé. Il est le dernier à être tiré hors du brasier car ses amis le croyaient mort. "Pourquoi cela se passe-t-il ainsi pour moi?" Effroyablement brûlé, il est désormais le monstre (littéralement "celui qu'on montre") . Les enfants le regardent avec "des yeux comme des soucoupes", sa voisine de palier le montre à son fils pour que celui-ci aille dormir. Enfermé dans son appartement, il emplit et desemplit son frigo de bouteilles de vodka. Il a gardé le lien avec ses amis du VAB. Ceux-ci se sont d'ailleurs brouillés à cause d'une sordide histoire d'argent. Mais le jour où l'un d'entre eux disparaît, c'est tous ensemble qu'ils vont vadrouiller dans les gares, car On n'abandonne pas les siens. Ce périple prend pour Kostia une dimension de quête initiatique, au fur et à mesure de laquelle il va apprendre à voir le monde, à le dessiner tel qu'il a été et aurait pu être. Retrouver son identité, son visage voire son âme. "Moi je sais que tu n'es pas méchant. C'est juste ton visage qui est comme ça" J'ai trouvé dans cette oeuvre une présence admirable, comme une tendresse, une innocence retrouvée, perçant sous la dureté du monde. Le rapport à l'autre est à la fois simple et complexe, et l'évolution des personnages très travaillée. Le ton est touchant tout en étant juste (évite superbement l'écueil du pathos). Ce livre est pour moi une très belle découverte. Lien à poster
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